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Investir dans le vin, opportunité et risque

Investir dans le vin, opportunité et risque
01/12/2016

Le vin n’a jamais autant fait tourner la tête ! En 2016, une société d'enchère spécialisée dans le vin, la maison Zachys, a vendu à Hong Kong un lot de 12 bouteilles de Château Petrus 1990 pour un montant de 343.000 HKD la bouteille (soit 493.920 EUR la caisse)! Et ce n’est pas les grandes fortunes françaises et belges ,Bernard Arnault et Albert Frère, propriétaires du domaine viticole Cheval Blanc, qui nous contrediront, les grands crus sont aujourd’hui considérés comme des produits de luxe qui s’arrachent à travers le monde avec une demande toujours plus soutenue venant notamment des pays émergents, Chine en tête. En effet, l'empire du Milieu est devenu aujourd'hui le premier consommateur de vin rouge au monde devant la France. Mais, peut-on considérer le vin comme un investissement et quels sont les éléments à avoir en tête avant d’appréhender ce marché ?

Le vin en tant qu’actif financier

Si on se regarde le vin comme un investissement, celui-ci ne peut en réalité se limiter qu’à un nombre très restreint de grands crus. En effet, une des caractéristiques du vin, en tant qu’actif financier, est son problème de liquidité ! Un comble !

En effet, la liquidité d’un actif représente la facilité avec laquelle celui-ci peut être revendu à une contrepartie, or en dehors des très grandes étiquettes, il n’existe pas de bourse d’échange du vin. La première chose à savoir avant d’investir dans le vin est qu’il vous faudra, si votre but n’est pas simplement de boire le breuvage, de vous limiter aux vins d’exception, aux étiquettes, c’est à dire une liste restreinte d’une petite centaine de bouteilles parmi lesquels on retrouve les vins de légende comme le Château Petrus, le Domaine de la Romanée-Conti ou encore le Château Lafite-Rothschild pour ne citer qu’eux.
Une autre des caractéristiques du vin, à l’instar des matières premières, est son absence de rendement, voir son rendement négatif si on prend en compte les coûts de stockage. A la différence de l’or, le risque est ici augmenté par la probabilité de perte totale de l’investissement en cas d’altération du précieux flacon. L’investisseur devra être vigilant à la conservation de son investissement qui ne se revendra qu’à la condition qu’il soit dans un état irréprochable c’est-à-dire conservé dans une cave fraiche, sans variation de température et suffisamment humide. Il existe notamment en Angleterre, au Luxembourg et en Suisse des zones franches, permettant de conserver ces actifs d’exceptions dans des conditions optimales et en bénéficiant d’un régime fiscal particulier (absence de tva, etc.).

La fixation des cours de grands crus

A tout seigneur, tout honneur, les grands crus possèdent leur propre bourse, le Liv-ex. Cette bourse de vin d’exception, située à Londres, permet aux professionnels acheteurs et vendeurs de se rencontrer. Les prix de leurs échanges sont ensuite publiés et servent de référence pour la fixation du prix des vins à travers le monde. Les vins échangés sur cette bourse disposent d’un volume significatif sur le marché secondaire et sont vendus à la caisse. On parle en fait principalement de vins français d’exceptions.
Cette bourse est composée de plusieurs indices parmi lesquels le Liv-ex Fine Wine 50 qui suit le mouvement quotidien des prix des produits les plus fortement négociés sur le marché du vin fin.
Si on examine l’évolution de cet indice, on notera qu’il est toujours négatif sur une période de 5 ans avec une perte de -8,69% (au 31/10/2016). En effet, 2011 a été une très mauvaise période pour les vins fins qui ont également été victime de la crise financière et de la chute de la demande venant des pays émergents. Depuis le début de l’année, le marché connaît un regain important d’intérêt avec une plus-value qui avoisine les 25% ! Le vin est donc à considérer comme un actif financier spéculatif dont le rendement est nul et la plus-value non garantie. L’investissement dans le vin ne peut se concevoir que sur le long terme et pour une fraction limitée de votre portefeuille.

Facteurs qui influencent le prix des vins d’exceptions

Comme pour chaque actif financier, il est périlleux de vouloir modéliser avec précision l’ensemble des facteurs qui influencent le prix des vins d’exceptions.
Comme pour les actifs traditionnels, les vins fins sont suivis par des analystes, on parlera ici de critiques, parmi lesquels on retrouvera bien entendu le légendaire Robert Parker. Celui-ci développa dans les années 80 un système de notation des vins sur 100. En deçà de la note 85, un vin est jugé médiocre. A partir de 90, il devient intéressant. La nuance se joue alors au point et même au demi-point. Robert Parker devint si influent qu’une baisse d’un ou deux points était aussitôt répercutée sur le marché. Un mot de Parker et la cote s’envolait, une remarque négative et la cote était revue à la baisse. 
En dehors, de ces notations, au niveau de l’offre, un grand nombre d’autres facteurs influencent le prix du vin comme les conditions météorologiques, la rareté du vin (certains grands châteaux limitent leurs productions à quelques milliers de caisses !), le savoir-faire du vigneron ou encore la qualité du terroir. Au niveau de la demande, après avoir été concentrée pendant des années sur les pays fondateurs du commerce des vins à savoir l’Angleterre, la France et les Etats-Unis, elle est aujourd’hui mondiale et a explosé depuis 2009 en Asie, et principalement à Hong Kong, où les droits d’importation n’existent pratiquement pas.

En conclusion, nous retiendrons que le vin à l’instar de n’importe quel investissement comporte sont lots de risques et d’opportunités. Nous retiendrons néanmoins une différence de taille en faveur de l’investissement dans le vin : en cas de moins-value, il vous sera toujours loisible de boire votre investissement pour vous consoler !

 
Par Jérémie Pulinx, administrateur de Waterloo Asset Management, gérant de fortune à Luxembourg.