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Les questions les plus posées en ce début 2022 - par Mikael PETIJEAN

<b>Les questions les plus posées en ce début 2022</b> - par Mikael PETIJEAN
03/02/2022

Depuis le début de l’année, les marchés financiers connaissent un regain de volatilité, suscitant par la même occasion son lot d’interrogations.
Comme nous l’avions déjà fait par le passé, nous avons décidé de rassembler les questions qui nous sont les plus régulièrement posées et d’y répondre avec l’aide du Professeur Mikaël Petitjean, Chief Economist de Waterloo AM, et de notre comité d’investissement. Voici les trois premières questions et leurs réponses. Nous continuerons à vous informer au fur et à mesure de l’évolutions de la situation. 

Sous l’égide de notre Chief Economist et de ses analyses macroéconomiques notre Comité d’Investissement se réunit chaque semaine pour analyser l’actualité et évaluer les éventuelles actions à entreprendre dans l’allocation de nos fonds d’investissement. Notre équipe se tient à votre entière disposition pour organiser un entretien individuel à votre meilleure convenance.

Quel impact l’invasion de l’Ukraine par la Russie pourrait-elle avoir sur la situation géopolitique, sur l’économie mondiale, et sur les places financières ?


L’impact de l’invasion de l’Ukraine sur les marchés est difficilement prévisible. Toutes les études et simulations boursières montrent qu’il est impossible de prédire la survenue d’un tel évènement avec suffisamment de précision que pour espérer en profiter en vendant ses actions au bon moment et par anticipation. C’est tout le contraire qui se produit lorsque les investisseurs, y compris les fonds spéculatifs, essaient de le faire : lorsqu’ils tentent d’anticiper le déclenchement d’une guerre, ils sortent souvent trop tôt du marché. Ils parviennent parfois à éviter une chute des cours mais ils ne rachètent pas suffisamment rapidement par crainte de subir une nouvelle chute. Ils ratent très souvent le rebond qui s’avère la plupart du temps plus ample que la chute qui l’a précédé. Au bout du compte, ils font moins bien que ceux qui sont restés investis et ont fait le « gros dos ». Nous avons pu observer le même phénomène durant la chute de 2020 liée à la crise de la Covid19. Il est crucial de se rappeler que rater les 5 meilleurs jours de bourse d’une année, annule la plus-value annuelle d’un indice boursier.

Souvenons-nous aussi des conséquences de conflits récents tels la guerre des Balkans, les invasions de l’Irak ou de l’Afghanistan. Ils ont rendu les marchés plus volatils mais ne les ont jamais conduits à la déroute. Ce sont plutôt les crises bancaires et immobilières qu’il faut avant tout redouter. Nous ne croyons pas que conflit entre l’Ukraine et la Russie évolue en un conflit mondial. Par contre, nous anticipons qu’ il pèsera sur les marchés financiers. Il rappelle certainement la dépendance énergétique de l’Europe en général, et au gaz russe en particulier. L’Italie, L’Allemagne et l’Autriche en sont les plus grands consommateurs avec respectivement pour 12,4%, 16% et 19% de leurs consommations énergétiques totales. La Russie vend son gaz ; elle ne le livre pas gratuitement. Ceci dit, même si le président Poutine rêve d’une « nouvelle URSS », prendra-t-il le risque d’affaiblir son pays dans le cas où les Etats-Unis décident de soutenir davantage les activités de l’OTAN dans la région ? Des escarmouches et/ou des tentatives de déstabilisation politique sont probables. Toutefois, aucun des protagonistes n’a intérêt à une escalade et en particulier Mr Poutine déjà affaibli en matière de politique intérieure.

Les grosses capitalisations du Nasdaq souffrent depuis le début de l’année, bien plus que le reste du marché, tirant dans leur sillage le reste des bourses mondiales. Quelles en sont les causes réelles ?

La cause première est leur extraordinaire performance liée à la crise sanitaire de la Covid19. La « tech », dont les activités sont généralement dématérialisées, « n’a pas attrapé pas le virus ». Au contraire, elle a pleinement bénéficié de cette prime qui va sans doute bientôt fondre, lorsque nous passerons du stade de la pandémie au stade de l’endémie.

L’âge moyen des « techs » est une deuxième cause. Les valeurs technologiques sont des entreprises plus jeunes que les entreprises traditionnelles. Pour les « techs », les investisseurs sont donc généralement disposés à patienter avant la réalisation de profits futurs, à condition que la croissance (ou la promesse) du chiffre d’affaires reste forte . Le cours de leurs actions dépend donc fortement de la croissance du chiffre d’affaires. Or, bon nombre de « techs » ont vu leur chiffre d’affaire croître en phase de pandémie (sans Netflix, on se serait ennuyé - sans téléconférence, on n’aurait pas pu travailler à domicile – sans biotechs, on n’aurait pas eu de vaccins aussi rapidement - etc.). Aujourd’hui , un ralentissement de leurs ventes est attendu, avec le retour à une activité normalisée, du moins dans les pays à fort PIB.

La remontée des taux d’intérêt est la troisième cause majeure. Les décisions des banques centrales combinée avec les attentes des marchés pèsent sur les valeurs futures des entreprises technologiques, et donc sur le cours de leurs actions. Par exemple, lorsque les profits n’arrivent que dans 5 ans, au lieu de l’année prochaine, l’impact d’une hausse des taux pèse plus sur les cours des actions. Ainsi, si vous attendez 100 euros de profits dans un an et que les taux d’intérêts passent de 1% à 5% (pour simplifier), le cours de l’action chute de 3,81%. En revanche, si vous misez sur une profitabilité plus tardive de 100 euros dans 5 ans, alors le cours de votre action chutera de 17.65%. Plus les profits sont lointains et incertains, plus une remontée des taux d’intérêts peut impacter le cours de bourse. Time is money !

L’impact sur les marchés a été négatif depuis début janvier, mais qu’en est-il pour la suite de l’année ?

C’est avant tout la performance de la fin de l’année dernière qui a été élevée. Les marchés ont été particulièrement robustes durant le quatrième trimestre de 2021. L'émergence du variant omicron et le resserrement annoncé de la politique monétaire des banques centrales n’ont pas empêché les marchés boursiers dans leur ensemble de terminer l’année à des niveaux proches de leur sommet historique. Les inquiétudes financières liées à la situation sanitaire se sont d’ailleurs dissipées en décembre lorsqu’il est apparu que l'économie américaine dans son ensemble ne décrochait pas et que les bénéfices des entreprises étaient solides. L’indice du MSCI World a clôturé le dernier trimestre en hausse de 7,86 % contre 0,09 % durant le trimestre précédent, dividendes compris. Sur l’ensemble de l’année 2021, la performance est remarquable. Elle atteint 22,35 % au niveau mondial, tirée essentiellement par les Etats-Unis et l’Europe.

Notons que personne n’avait pu anticiper une telle hausse. Il est normal et même fondamentalement sain d’avoir une correction. Elle s’explique par la phase de normalisation de la politique monétaire aux Etats-Unis, dans laquelle nous entrons.
Toutefois, il n’y a actuellement aucune alternative aussi liquide et rémunératrice à 5 ou 10 ans, que les actions. Un portefeuille correctement diversifié amortit également le choc d’une correction boursière. Une correction sur le marché des actions ne doit pas être à notre sens l’occasion de paniquer. C’est au contraire l’occasion d’injecter des liquidités et d’acheter. C’est précisément dans ces circonstances qu’il y a le plus de chances d’acheter des actions sous-évaluées par le marché. Sortir du marché pour éviter une chute des cours, cela implique de rentrer dans le creux. En jargon financier, on appelle cela des tactiques de « market timing ». Les études académiques ont montré qu’elles conduisaient à sous-performer les stratégies d’achat à long terme pour la simple raison que les investisseurs ne rentrent jamais dans le creux et rachètent beaucoup trop tard. Autrement dit, personne n’est jamais parvenu à définir le début ou la fin du cycle haussier ou baissier avec suffisamment de précision. Ce sont les études académiques qui le montrent.

Par Mikael PETITJEAN et l’équipe d’investissement de Waterloo Asset Management.